Loin sont les finistères de Kiya, l’âme de Constantinople. De culture persane, jouant du sétar, accompagné d’instruments baroques, il est passionné de manuscrits anciens et curieux des traditions orales. Lors d’un voyage, il fait escale au Mexique, à Veracruz, là où Cortès jeta l’ancre, mettant fin à l’une des civilisations les plus savantes du globe, au culte du Jaguar et du Serpent à plume. Depuis longtemps la ville n’est plus aztèque mais bien mexicaine et réputée pour sa musique. En particulier, le « son jarocho » qui sonne espagnol, portugais, gitan, amérindien, africain, cubain et accompagne les cent vingt fêtes annuelles du pays. On y chante et danse avec les morts, la samba ou la compara, toutes deux nées à Veracruz d’où viennent José Angel et Teresita. Entourés d’instruments venus du temps des conquêtes, la petite guitare garant et le requin to populaires mexicains prennent leur place dans la bonbonnière, surnom donné à l’un des plus beaux théâtres à l’italienne de la région.
Constantinople explore une « nouvelle Méditerranée »: le golfe du Mexique et l’espace ouvert et fusionnel des Caraïbes où se mélangent les influences amérindiennes, européennes et méditerranéennes… Terra Nostra. Après avoir entrepris des recherches, plus précisément sur le son Jarocho, les frères Tabassian ont rencontré José-Angel Gutiérrez, un des piliers de cette tradition musicale, et son épouse Teresita; grâce à cette rencontre évidente, car une même passion les unit, ils ont pu discuter du projet Terra Nostra. Le projet est né du désir d’aller à la rencontre de l’Autre dans ce « Nouveau Monde », de se perdre dans cette riche tradition musicale et d’appartenir à cette terre, par le biais de sa musique. Depuis des années, José-Angel fait la même démarche en sens inverse, en allant à la recherche des racines de sa musique, vers l’Andalousie, la Méditerranée et l’Orient.
Avec Terra Nostra, un retour au Mexique du XVIIe siècle, Constantinople se lance de nouveau à la quête des liens profonds entre le monde des sources écrites anciennes et les sources de traditions orales vivantes. L’héritage et la profondeur d’un « vieux monde », et l’effervescence et l’ouverture d’un « nouveau monde », donnent naissance à une nouvelle musique, mélange de traditions monophoniques et de polyphonies improvisées.